Songe d'une nuit
Cette nuit, je t'ai vu mort. Je t'ai vu te faire tuer. Je t'ai vu rendre l'âme dans d'atroces souffrances.
Je ne sais plus pourquoi c'est arrivé. Par contre je revois encore l'aiguille qui se plante dans ta carotide par erreur, le produit qui te fait t'étouffer, les convulsions qui te saisissent. Ce n'est pas moi qui tient l'objet de ta mort, mais je sais que ce geste de ta part avait pour but de me protéger.
Mais viens le moment où l'on m'annonce ton décès. Je suffoque. Quelque chose en moi se brise, le monde s'écroule et tandis que mes larmes roulent, mes genoux fléchissent et un cri de douleur insoutenable jaillit de mes lèvres. J'ai mal. Mon Dieu, j'ai mal. Mon cœur est en miettes, à jamais. Je ne suis plus que souffrances et dans ma tête c'est la tempête.
Les abysses diaboliques de l'obscur néant s'emparent de mon âme à la dérive. Un rien terrifiant s'installe dans mon être qui n'est plus qu'un vide glacial. Une seule chose persiste cependant, lourde et lancinante. La douleur de ta mort est tellement intense qu'elle ne laisse la place à rien d'autre.
Pourtant je dois avancer, pour ma survie. Je le sais, je le sens. Mais le désespoir qui s'est emparé de moi est tel que je fonds en larmes à chaque pas que je fais, chaque pas qui m'éloigne un peu plus de toi. Pourquoi tu es mort ? Pourquoi toi et pas moi ? Je t'aimais tellement ! Et je t'aimerai pour toujours. J'ai mal, tellement mal…Mais non il ne faut pas que je lâche, que tu ne sois mort pour rien.
Le supplice cependant, toujours plus fort… Et je finis par me laisser rattraper, presque soulagée et prête à mon tour à accueillir la Faucheuse, prête à te rejoindre…
… Et je me réveille, en sursaut, les yeux humides et les joues trempée d'avoir trop pleuré. J'ai chaud, j'ai froid, je suis désorientée. Puis un bruit parvient à mes oreilles. Ah oui. Le réveil. Mon lit. Mon appartement. C'était un rêve. Seulement un rêve.
Je retombe sur l'oreiller, encore bouleversée par les images qui tournent en boucle dans ma tête. Je sais une chose. Si tu devais mourir un jour, je ne m'en remettrait pas. Jamais. Je t'aime.